La mort, un marché méconnu avec ses modes et ses tendances

de Cécile Denayrouse, 29-30 octobre 2016

Avec plus de 65 000 décès par an en Suisse, la mort est un sujet qui concerne un jour ou l’autre chacun d’entre nous. Un sujet douloureux auquel on se refuse à penser trop souvent mais qui n’en est pas moins devenu une véritable industrie, puisqu’il faut compter en moyenne 6000 francs pour les funérailles – un chiffre en progression régulière. Ce secteur méconnu est loin d’être moribond et la tendance est à l’émergence de nouveaux services en phase avec les évolutions sociologiques, économiques et technologiques de la société. Il est désormais possible de créer une cérémonie funèbre sur mesure, laïque ou non, de choisir un cercueil ou une urne écologique, ou encore de rendre hommage aux défunts sur des sites Internet dédiés.

A Genève, Géraldine Juge s’est lancée cette année dans l’organisation de funérailles et propose des services d’accompagnement. La jeune femme se charge, entre autres, de dégoter un traiteur, imagine une cérémonie à l’image de la personne disparue et offre un soutien administratif de poids. Une prestation facturée en moyenne 1000 francs. «J’ai eu l’idée de créer cette entreprise après une expérience personnelle. J’ai perdu un proche il y a deux ans et j’ai eu énormément de difficultés à organiser quelque chose qui peut paraître simple: la diffusion de photographies sur un support numérique lors de la cérémonie.» Car sortir du cadre classique peut s’avérer contraignant, en plus du chagrin et des mille et une obligations administratives qui incombent à la famille. Outre-Atlantique, avoir recours à un funeral planner est parfaitement normal. «Une cérémonie, c’est le dernier hommage que l’on rend à une personne que l’on a aimée, mon travail est de faire en sorte que ce moment soit le plus beau et le plus juste possible.» Et la question de la laïcité est souvent au coeur des demandes.

A Genève «Aujourd’hui, une majorité de gens ne se retrouve pas dans les services religieux classiques», confirme Jeltje Gordon-Lennox. Pour répondre à un besoin toujours plus grand de personnalisation, elle a fondé l’association Ashoka à Genève et a déjà formé plus d’une trentaine de célébrants de funérailles séculiers. «Beaucoup de gens ne sont pas à l’aise avec l’idée d’un prêtre. Nous rencontrons les familles et, avec elles, nous dessinons une cérémonie qui leur ressemble, en adéquation avec la personnalité du défunt. Cette phase d’accompagnement est nécessaire au deuil.» Un célébrant a tout de même un coût. Reste ensuite l’aspect concret: dans quoi installer le corps du disparu? L’an passé, 81% des familles genevoises touchées par un décès ont opté pour l’incinération. Certains choisissent parfois une alternative verte ou économique au polluant cercueil classique. La société AB Crémation a par exemple créé des cercueils en carton, moins chers et parfaitement écologiques. Sur le site www.extra-celeste.com, Sandra Piat propose des urnes funéraires biodégradables, que l’on peut enterrer, ethniques ou bouddhistes, en paille, en verre soufflé ou en fils de soie tissés… Bien évidemment, le marché s’ouvre aussi aux nouvelles technologies. De nouveaux sites apparaissent aujourd’hui, souvent dédiés à la transmission du patrimoine numérique ou de tout autre document à transmettre à ses proches une fois décédé. Ainsi, La Vie d’Après.com est un site Web qui permet à chacun d’organiser l’envoi de messages (avec photos, vidéos, sons et copies de documents) à ses proches après son décès. E-mylife permet, moyennant 22 euros par an, de stocker des données (photos, vidéos, documents tous formats) dans un espace virtuel. Elles seront envoyées avant ou après la mort à des proches par e-mail, courrier, ou remises en mains propres.

Tribune de Genève

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